Soirées Grands Vins inconnus (08 et 15/11)
Le but de cette soirée était de sortir des sentiers battus et de montrer qu'il y a de très grands vins partout sur la planète si l'on prend la peine de chercher.
La sélection mélangeait quelques cépages/régions/pays rares, des cuvées méconnues de producteurs qui eux nous sont familiers, des vignerons célèbres dans leur pays mais que l'on croise assez peu en France ou encore des vins que nous n'avions encore jamais goûtés à la cave. Donc bien évidemment, tous ne sont pas inconnus pour tout le monde.
Il y a tellement de vins que nous aurions pu faire goûter dans cette soirée... Les frapatto d'Occhipinti, Le Col du Loup de Cyril Fahl, La Solera de Bretaudeau, Kollwentz, Antigone, les chasselas de Ziereisen, Jardin de las Iguales, Comando G, Compania dos profetas, Njord, Ardoisieres Quartz, les vieux Corbineau ou Lenoir, les Epinays de Chidaine, Chemin de Croix, Rockford basket press, Twardowski, Il Guercio.... Mais aussi des Madère, Xérès, vins allemands... mais ils auront ou ils ont déjà eu leur soirée à part. Bref, il a fallu faire des choix. Sans compter qu'il y a aussi beaucoup de vins que nous ne connaissons pas nous-mêmes, mais difficile de les faire goûter du coup :)
Soirée n°1
1 Vino Gross (Slovénie), Iglic furmint 2019 : (Jeune domaine créé par Maria et Michael Gross (autrichiens) dans le village de Gorca, région de Haloze, à l’est de la Slovénie. Terrasses argilo-calcaire en pente. Clones de furmint achetés à Szepsy en 2008. 350-400m altitude. Elevage 12 mois gros fûts + 4 mois cuve inox. 13%. 60% vignes ont 13ans 40% 38ans) Couleur or, nez un peu typé riesling, résine, hydrocarbure, citron confit, miel. Bouche avec un peu de gaz à l’ouverture, mais sinon ne semble pas spécialement nature, très droite, énergique, sensations minérales et salines, très citron confit, quelques fruits plus mûrs avec l’ouverture, pas une grosse complexité aromatique mais une finale impressionnante de longueur et d’intensité, semble encore tout jeune. L’équilibre est parfait. Ça commence fort.
2 Camin Larredya, Jurançon sec Costa Blanca 2021 : (côte calcaire. 75% petit manseng, 15% camaralet 15% lauzet. Elevage œuf en grès) Couleur or nez, nez d’abord sur la poire puis de plus en plus sur les fruits exotiques, acacia. Bouche avec une certaine gourmandise, fruits exotiques frais, presque une impression d’un peu de sucre, mais aussi une grosse acidité, des amers très nobles, semble déjà à point, très complexe, très long et salivant. Tout s’équilibre parfaitement, les 14% ne se sentent que par le volume en bouche, finale interminable.
3 Takahiko (Japon), Nana Tsu Mori pinot noir 2018 : (île d’Hokkaïdo. Ville de Yoichi. 4,5ha environ. Nana tsu mori = les 7 forets car 7 types d’arbre sur le domaine. Takahiko Soga a créé le domaine en 2010, Microbiologiste à Tokyo puis il a travaillé sur le domaine Coco Farm Winery, il a ensuite voyagé en Bourgogne et Jura. Planté à 3000 pieds/ha seulement sur des sols de graves et de sables reposant sur un substrat volcanique. Beaucoup de neige en hiver, ce qui protège du gel, puis des étés chauds et secs. Vendanges fin-octobre. Travail en grappe entière, fermentations en cuves, au froid, avec inertage CO2. Puis élevage en barriques françaises dont 10% neuves. Très peu de sulfites) Couleur très claire, nez incroyable de rose, pot-pourri, petits fruits, tendance nature au sens éclatant, d'une grande pureté, il me rappelle Bizot, les Horées ou autres très grands bourgognes. La bouche est un peu en-dessous, légère, un poil maigre, acidulé, trait végétal, facile à boire, mais manque une pointe de maturité pour être très grand.
4 Passopisciaro (Sicile), Etna Contrada Rampante 2018 : (100% nerello mascalese, parcellaire le plus en altitude du domaine, à Castiglione sur le versant Nord de l’Etna. Vignes centenaires. Elevage vieux foudres) Couleur claire et à peine rouillée, façon nebbiolo. Nez bourguignon de petits fruits rouges, floral, mais aussi une petite touche fumée et réglissée. Bouche qui présente peu de corps, légère en alcool sur ce millésime compliqué, finale sur de petits tannins serrés et salivants, mais plutôt fins pour un jeune Passopiciaro. C’est très bon, mais ce n’est pas la plus belle bouteille du domaine.
5 Ernst Triebaumer (Autriche), Burgenland Blaufränkisch ried Mariental 2015 : (100% blaufränkisch, à Rust, sur le lac de Neusiedl. Sols calcaires. Elevage en 500L) Couleur noire, nez solaire, café, fruits noirs, tabac, lardé, végétal noble, encore un peu d’élevage, entre syrah cabernet et tempranillo. La bouche qui s’annonçait très riche présente finalement une certaine forme de finesse, avec des tannins enrobés, une bonne acidité derrière le café et les fruits noirs, déjà un début d’évolution sous-bois. Bien fait, dans un style plus traditionnel que les autres vins du jour.
6 Abbatucci, Monte Mare 2022 : (100% sciaccarellu. Vignes pulvérisées à l’eau de mer. Elevage demi-muids et œuf béton) Couleur rubis brillante, nez très confiture de fraise, grenadine, épices exotiques, badiane. Bouche toute en rondeur, 15% d’alcool qui ne se sentent pas du tout, plein de fruits rouges sucrés, texture soyeuse, la finale reste fraîche et saline. Plus de corps que la cuvée Faustine, plus frais et aérien que le cuvée Monte Bianco même si on ressent clairement un air de famille.
7 Bodega Cerron (Espagne), Jumilla El Cerrico 2016 : (100% airen. Vignes préphylloxériques à 900m d’altitude. Fermentation en jarres en terre cuite. Elevage en fûts de 500L puis en cuves) Couleur dorée, nez grillé, beurré, très bourguignon au départ, des fruits plus mûrs dans le fond. Bouche légère en alcool (12%) pour le sud de l’Espagne, acidité basse, sur les arômes du nez, manque un peu d’intensité et de tension dans la série.
8 Gravner (Italie), IGT Venezia-Giulia Ribolla Gialla 2014 : (à Oslavia, dans le Collio. Légende du vin orange. 6 mois de macération suivis de 6ans d’élevage en foudres) Couleur orange aux reflets roses, nez complexe mais moyennement expressif pour un vin orange, encore tout jeune, abricot, melon, réglisse, pin, rose, touche fumée… La bouche présente des tannins fins pour une macération, sur les arômes du nez, élégant, très propre, mais presque trop, il manque un peu d’intensité, impression que le vin ne se livre pas encore totalement par rapport aux meilleures bouteilles du domaine. Le fond regoûté le lendemain à température ambiante semblait justement plus intense.
9 Brännland (Suède), Iscider 2023 : cidre de glace suédois, tranquille même s’il y a un léger perlant, environ 170gr de SR, 9,5% d’alcool, très aérien, frais, rafraîchissant grâce à son acidité très élevée. Superbe équilibre.
Bonus : D&B Milutinovic (Serbie), Ausbruch 2001 : (Sila, Petra et Pinot blanc, enrichi avec menthe, aubépine etc… 16,5%) Une curiosité pour finir, un liquoreux encore jeune très marqué par la menthe et une impression de plantes médicinales qui donnent de la fraîcheur. Un OVNI. Merci Bertrand pour la découverte.
Soirée n°2
1 Thibaud Boudignon, Savennières Clos de la Hutte Franc de pied 2020 : (élevage en wine globe) Couleur claire, nez assez simple et aromatique, pêche, agrumes, floral, trait végétal. Bouche légère en alcool, vive et fruitée, demi-corps, assez simple en l’état, beaucoup de finesse mais presque trop peut-être, longueur moyenne. Petite déception à la levée de la chaussette, c’est bon, mais les fans du producteur et du Clos de la Hutte classique en attendaient plus.
2 Dagueneau, Pouilly-fumé Intouchables 2019 : (fié gris ou sauvignon gris) Cuvée très particulière de Dagueneau, avec une couleur à peine saumonée, le nez est sur les agrumes, les fruits rouges, notes fumées, pas spécialement marqué sauvignon. La bouche est magnifique, puissante en alcool (14%) mais cela se ressent uniquement dans l’intensité du vin, c’est mûr, avec du corps, pas d’élevage ressenti, et surtout une très grosse acidité qui équilibre le tout, finale très longue, salivante. Très beau vin.
3 Kusuda (Nouvelle-Zélande), Martinborough syrah 2019 : (Saleyard vineyard 1,1ha à 40m altitude. Vignes de 1992. Rendements 20hl/ha. Sols alluvionnaires argiles, graves. 10% VE. Préfermentaire à froid. Elevage 22mois en fûts dont 29% fûts neufs. 1905 bouteilles) Couleur sombre, nez marqué syrah, poivré, fruits noirs, légèrement animal, violette. La bouche est très fine, avec des tannins soyeux, légère en alcool, l’aromatique est sauvage comme au nez, mais le vin semble très fin en même temps, facile à boire, encore un peu d’élevage, beaucoup de rondeur, mais pas de sucrosité. Joli vin, mais très différent de la dernière bouteille bue qui faisait un peu cinsault en comparaison.
4 Cassagne et Vitailles, Les Crouzets 2021 : (100% grenache, Languedoc-Montpeyroux. Issue d’une parcelle âgée de 50 ans, sol de graves argileuses) Couleur très claire, infusée, magnifique nez de fruits rouges un peu sucrés, pivoine, pétales de rose, pur, éclatant. La bouche est très fine, toute en fruit et en fleur, avec une touche de gourmandise à peine sucrée, mais sans lourdeur. Il y a quand même du volume, un toucher de bouche soyeux et de la longueur. Sublime.
5 Justine Vigne, Vin de France Yoga 2022 : (Lieu-dit Le Serret, Vaucluse. Vignes de 1986 et 1978. Sols sable argile calcaire et gypse. Grappe entière. Vinifié sans sulfites en cuve puis élevage en jarre) Couleur sombre, nez sauvage de tapenade, olive, notes animales, violette, peu de doute sur la syrah. La bouche réussit à garder beaucoup d’éclat, du fruit, de la fraîcheur, des tannins très fins, semble déjà prête à boire. Attention toutefois un vin à dégazer, mais à ne pas trop aérer non plus.
6 Kutch, Sonoma Coast Bohan vineyard pinot noir 2021 : (achat de raisins à la famille Bohan qui fournit aussi Failla, Flowers, Sandlands, Arnot Roberts. 400m altitude. 4,5kms de l’océan. Vignes de 1972. Sols de grès, sable avec un peu d’argile « Goldridge ». 50% VE, fûts non neufs.) Couleur assez sombre pour un pinot, nez très fin et délicat, sur la cerise rouge principalement, très typé pinot, même s’il n’est pas encore parfaitement ouvert. La bouche est très belle, pinot à la fois fin et sérieux, fruité, acidulé, encore un peu de tannins mais de qualité, il demande un peu de temps, encore un peu jeune, mais beaucoup de fond et un équilibre parfait, sans aucune sucrosité, pas du tout « nouveau monde » là aussi.
7 Valentini, Trebbiano d’Abruzzes 2018 : (100% bombino bianco par la légende des Abruzzes) Couleur dorée, nez marqué par les lies, grillé/fumé, avec aussi des notes citronnées, brioche, épices, floral. La bouche est aussi marquée par les lies, plutôt en finesse et tension sur ce millésime, on sent que c’est encore jeune bien sûr, mais déjà noble et distingué, avec du fond, juste un peu trop en réduction sur lies pour le moment.
Bonus :
Charles Dufour, Liqueur de Comptoir Mistelle L2010 : le nez sent clairement le marc, pas de doute possible sur la mistelle (Vin de Liqueur), joli fruité, beaucoup de mirabelle surtout, touche d’amande, brioche. Bouche avec pas mal de sucres, l’alcool est bien intégré, l’équilibre est bon, c’est très gourmand, pas trop lourd, très bien fait. Le Nid, Moulin à Vent 2018 : bouchon Clos de Gat, Chardonnay Judean Hills 2016 : chardonnay déjà bien évolué, miellé, tertiaire, beurré, élevage poussé mais désormais intégré, mais la bouche a gardé une belle acidité, pas de lourdeur ni de sucrosité, plutôt bien fait. Calem, Porto Vintage 1985 : Couleur sombre, un vintage encore tout jeune, puissant, qui n’a pas encore mangé ses sucres, intense, long, et chaleureux. Fleury, Champagne Blanc de Noirs : champagne vineux, bulle fine, mûre, marqué pinot noir, peu dosé (3gr) sans tomber non plus dans l’austérité.
Un très beau niveau global, et au final on se rend compte qu'on ne peut pas échapper à la loi des séries, au contexte de dégustation et à l'aveugle également peut-être. Par effet de comparaison, certains vins surnagent et d'autres souffrent de l'effet de séquence, alors qu'ils s'en seraient probablement mieux tirés dans une autre série ou bus seuls. Mais c'est le jeu !